A Collaroy, jolie banlieue de Sydney face à l'océan, les maisons et immeubles se négocient chers, dans un décor de carte postale. Mais s'il est difficile de trouver des habitations à prix abordables, il est parfois plus difficile encore de trouver un assureur pour son logement. Le Pacifique est si proche que des vagues lèchent régulièrement les jardins à certains endroits. Tandis que les rapports sur les risques liés au changement climatique et à la montée des eaux se multiplient, les Australiens s'inquiètent. Le mode de vie "aussi" serait en danger, titre la presse. Les maisons de bord de mer pourraient bien avoir à disparaître.
Sur 21 millions d'Australiens, 85 % vivent sur les côtes. Alors que les projets immobiliers se sont multipliés depuis trente ans, le développement s'est fait avec peu de régulations, et des logements ont été construits très proches de l'océan. "Il existe déjà des problèmes ; les grands immeubles à côté des plages ne permettent pas aux dunes de se restaurer naturellement après les tempêtes", dit Rodger Tomlinson, spécialiste de la conservation du littoral à l'université Griffith.
Et selon un rapport publié il y a quelques jours par le ministère du changement climatique, la situation pourrait devenir catastrophique. Partant de l'hypothèse d'une montée du niveau des océans de 1,1 mètre d'ici à 2100, le rapport, préparé par des scientifiques australiens, estime que près de 250 000 logements pourraient être inondés régulièrement d'ici à la fin du siècle. Des infrastructures, des écoles seraient menacées : 75 hôpitaux sont ainsi à moins de 200 mètres des côtes. "C'est un peu l'effet Venise ; chaque fois qu'une grande marée va se produire, davantage de terre sera affectée", estime Bruce Thom, qui a dirigé le rapport. "Un mètre de montée du niveau de la mer, c'est 10 à 20 mètres de retrait pour la ligne côtière", précise Andy Short, professeur à l'université de Sydney.
L'augmentation des épisodes climatiques extrêmes, comme les tempêtes, pourrait bouleverser l'équilibre. Autre menace, la salinisation des terres dans les estuaires. "Le rapport a provoqué un choc. Jusqu'ici, les Australiens pensaient que seules les plages face à l'océan seraient touchées. En réalité, cela concerne aussi les estuaires, les zones de basse altitude. Cela ne va pas arriver demain, mais il faut commencer à s'y préparer", observe Bruce Thom.
Débats intenses
Certaines régions pourraient être rapidement touchées. Ainsi les îles du détroit de Torrès, au nord-est du pays, sont particulièrement vulnérables. Les grandes marées, au mois de janvier, les recouvrent déjà en partie. "Avec une plus grande fréquence des cyclones, ces atolls sont en danger d'être inondés. Sans oublier que les habitants dépendent des sources d'eau fraîche qui risquent d'être contaminées", commente Andy Short.
En réaction, la ministre du changement climatique, Penny Wong, a demandé un plan d'urgence. Mais le type d'action à mettre en place est le fruit de débats intenses. Le rachat des propriétés par les Etats australiens pour un "retrait programmé" est discuté, tout comme la mise en place de digues. A Byron Bay, charmante ville balnéaire à l'est du continent, le conseil municipal est entré en guerre avec des résidents qui voulaient protéger leur maison. "La construction de murs signifie qu'avec l'érosion il n'y aura plus de plage. Or la plage est essentielle, économiquement et socialement pour les Australiens : c'est l'endroit où l'on se retrouve", commente Jan Barham, maire de Byron Bay.
Le rapport a été publié alors que le gouvernement présente un projet de marché du carbone au Parlement. Il vise une réduction de 5 % à 15 % des gaz à effet de serre d'ici à 2020 par rapport à 2000 et de 25 % si un accord était trouvé à Copenhague. Pour des environnementalistes, la réduction fixée sera de toute façon insuffisante pour limiter réellement l'impact du changement climatique sur les côtes.
Marie-Morgane Le Moël pour Le Monde
mardi 24 novembre 2009
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